Grand public, mais pas Tout public

Je parle d'Unity, la nouvelle interface d'Ubuntu depuis la version 11.04 (Natty Narhwal), appelée à être la seule proposée dans la prochaine version 11.10 : Oneiric Ocelot

Après plus d'un mois de tests divers, c'est la conclusion à laquelle j'arrive : cette interface n'est pas pour moi. Et je dois pourtant reconnaitre que, pour une première sortie dans le monde, elle a plutôt bien réussi à attirer des regards auparavant rebutés par le coté trop technique de Gnome.

Unity est pensé pour :

  • Gagner de la place pour tenir sur les petits écrans 16/9.

Le dock placé verticalement à gauche (et qui disparait automatiquement), la barre unique (qui absorbe le menu de l'application courante), et la maximisation quasi automatique des fenêtres (dès qu'on les déplace vers le haut de l'écran), tout cela est fait pour gagner de la place sur les netbooks (ou les tablettes) de 10" ou 11".

  • Être utilisable avec un écran tactile.

J'en veux pour preuve les ascenseurs fins (également développés pour gagner un peu de place) qui sont bien moins pratiques à l'usage avec une souris que les anciens (qui eux, ne sont pas adaptés du tout aux écrans tactiles), et la taille copieuse des icônes qui, par défaut, remplace le classique menu arborescent.

  • Faciliter les 10 tâches les plus courantes de son utilisateur.

Le remplacement des menus par des pages d'icônes de belle taille, reprenant l'aspect des "smartphones", fait que seules les applications placées en première ligne seront facilement accessibles (en plus de celle du dock). Au final, c'est une douzaine d'application qui se partageront les usages du matériel qui portera Ubuntu[1].

  • Réduire le champ des possibilités directement accessible pour en simplifier l'appréhension et la maitrise.

La multitude de réglages, d'outils, d'applications qui permettent aux geeks de se faire des systèmes "sur mesure", personnalisés à l'extrême, sont maintenant relégués bien loin des yeux de l'utilisateur (quand ils ne sont pas tout simplement retirés). Ajouté à l'interface à la smartphone, les applications n'étant pas directement visibles resteront dans la plupart des cas inutilisées.

Fonction Exposé sous Unity

C'est la recette qui à marché pour Apple avec iOS sur iPad, poussant Android et MeeGO à lui emboiter le pas. Unity ne fait que tracer sa route dans cette mouvance que le Grand Public semblait attendre (à moins qu'un gourou visionnaire n'ait malicieusement orchestré la création de ce besoin).

Voilà donc à quelle cible marketing Unity s'adresse. Et a ce titre, bien que jeune et souffrant de quelques défauts, force est de reconnaitre qu'il est plutôt réussi.

Hélas, si vous êtes comme moi :

  • adepte des raccourcis clavier combinés à la souris trois boutons et du drag'n drop,
  • équipé d'un grand écran (24" et +, 1920x1200 et +) et rêvant d'acheter un 30" en 2560x1680,
  • utilisant au quotidien les 4 bureaux de Gnome (ou +) pour y répartir une trentaine de fenêtres de presque autant d'applications,
  • fonctionnant en multi-tâche et ayant besoin d'avoir tout sous les yeux simultanément.

Hé bien, il faut commencer à chercher une alternative à un Gnome 2 vieillissant, qui ne sera probablement pas Gnome 3[2], et certainement pas Unity.

J'en suis là; j'ai déjà testé :

  • Xubuntu : xfce à un petit air de Gnome qui me plait bien, et je ne m'éloignerais pas trop d'Ubuntu, mais il reste des traces des adaptations faites pour Unity,
  • CrunchBang : basée sur Debian, ce qui en fait tout l'attrait, et utilisant Openbox, axé sur l'efficacité (et même un peu spartiate); xfce est aussi disponible.

Je passe beaucoup de temps sur Distrowatch, et les machines virtuelles de test s'accumulent au fond de mon disque.

Mais je ne suis pas seul, de nombreuses personnes font face au même problème d'avoir à (re)découvrir des distributions auxquelles ils n'accordaient plus d'attention. C'est un peu comme chercher de nouvelles chaussures pour remplacer celles dans lesquelles on se sentait si bien, un modèle que bien sûr on ne retrouve plus, mode oblige.

Et c'est la grande force des logiciels libres que de permettre ce brassage d'idées, cette variété d'assemblage, cette innovation; si un besoin existe, une solution apparaitra qui n'aura pas d'autre obstacle à surmonter que la volonté de le faire.

Notes

[1] Pour rire, dressez la liste des applications que vous lancez au moins une fois par semaine. Dépassez vous la douzaine facilement ?

[2] Certaines rumeurs font état d'une possible intégration de Gnome 3 au sein de la prochaine Ubuntu, voire de la suivante. Mais là aussi, un virage est pris pour faire évoluer l'interface en direction du grand public qui, s'il est moins flagrant, n'en est pas moins déroutant pour les habitués de la version actuelle.